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Leptine, dopamine et niveau d'activité

Il n’y a pas si longtemps, pour nos ancêtres chasseurs-cueilleurs, il fallait traquer le gibier, chercher de la nourriture...

Marcher, courir, s’avérait dans un tel contexte une activité essentielle à la survie. Nous étions bien loin du sport santé, ou sport défi, que les pros du marketing tentent d’emballer sous l’appellation trail ou running, un peu comme la pom’pote pour la compote…

 

C’est ainsi que la réalisation de cette tâche s’est vue renforcée au cours de l’évolution, au même titre que manger, boire, se reproduire,  par la mise en place d’un circuit de neurones dont l’activation s’accompagne d’une forte sensation de plaisir..

Ce circuit baptisé circuit de la récompense, conditionne en grande partie notre comportement et implique la libération d’une molécule clé : la dopamine..

 

Et il se pourrait bien que ceux possédant un système de récompense efficace, ceux éprouvant un véritable sentiment d’euphorie au cours de leurs déplacements…bref les plus addicts, aient eu un avantage à survivre, trouver de la nourriture, se reproduire, transmettre leurs gènes et cette addiction… 

Nous sommes les héritiers de ces chasseurs-cueilleurs, et même si le contexte s’avère à présent bien différent, beaucoup d’entre nous éprouvent toujours du plaisir à l’action..

Beaucoup d’entre nous mais pas tous….Oui ! Certains préfèrent aux hautes cymes, écrans télé et canapés.... Et bon courage à qui souhaiterait les déloger ! 

 

 

 

kilian-jornet-salomon.jpgA 3 ans  déjà, Kilian Jornet présentait un niveau d'activité nettement supérieur à la moyenne. La légende dit que c'est à cet âge qu'il aurait grimpé au sommet du Turc de la Molière à plus de 3000 mètres....

 

Comment expliquer cette différence d’attrait pour l’activité physique ? La meilleure compréhension des mécanismes moléculaires impliqués dans le circuit de la récompense permet-elle d’expliquer ces différences de motivation ? 

 

 

 

 

 Des chiens, des souris et des hommes…

En raison de la popularité de certaines courses et des prix remis aux vainqueurs, la sélection des chiens de traîneaux est devenue en Alaska un véritable business.

Ces chiens sont d’incroyables athlètes, avec un VO2Max huit fois supérieur à celui d’un homme moyen, capables de tirer pendant des jours, ingurgiter des quantités astronomiques de nourriture…Ils possèdent même des orteils palmés pour mieux se déplacer sur la neige..

La sélection poussée à son comble, il est fort peu probable que les éleveurs canins parviennent encore à améliorer, ces qualités physiques…

 

Lance Mackey, lui, véritable légende dans ce milieu,  n’a  pas eu comme autre solution, que de sélectionner des seconds couteaux…

Fauché, il lui a fallu croiser des tocards n’ayant jamais remporté le moindre sprint mais ayant le désir inné de tirer..

Et il s’est appliqué à sélectionner et croiser des chiens qui n’aspirent à rien d’autres qu’à manger et courir…

Des chiens incapables d’atteindre des pointes à 25 km/h mais pouvant tirer pendant des heures sans jamais se laisser porter par les autres membres…

Et c’est avec une bande de bras cassés au désir insatiable de courir, que Mackey parvint à terminer victorieux de courses dantesques de plusieurs centaines de kilomètres…Ils n’allaient pas vite..mais ils étaient prêts à tirer jusqu’à en crever..

Pourquoi vous parler de lance Mackey ?

Et bien s’il est possible d’obtenir des chiens plus motivés pour l’effort grâce à des croisements…c’est que cette motivation à une composante génétique !!

Oui ! La motivation à l’effort ne dépend pas que de facteurs environnementaux.

 

canicross.jpg

Une joie partagée... 

 

 

 

D’ailleurs les scientifiques sont parvenus à confirmer la composante génétique de  cette « éthique du travail »

Pour cela, ils se sont amusés à séparer systématiquement les souris qui, dans leur petite roue, courraient volontairement plus que la moyenne…

Et en en croisant ces « grandes coureuses » entre elles, un peu comme Mackey et ses chiens, ils  sont parvenus très rapidement, au cours de quelques générations,  à obtenir des souris, non pas plus douées physiquement, mais désireuses de faire tourner leur roue des heures et des heures, sans que personne ne les y oblige…

A l’instar des chiens de traîneau et des souris de laboratoire, certaines personnes semblent génétiquement prédisposées à éprouver un sentiment démesuré de récompense ou de plaisir à être constamment en mouvement. 

Et des circuits cérébraux similaires à ceux qui s’activent chez des individus en manque de nourriture, d’activité sexuelle pour les addict au porno, de drogue pour les toxicomanes, semblent sollicités chez ces individus, en cas d’absence d’activité physique..

En d’autre terme, il est possible que certains gènes vous prédisposent à être pantouflard ou sportif !

Une partie des mécanismes moléculaires impliqués semble même être à présent élucidée.

 

 

Leptine et dopamine

La Leptine doit sa popularité à son rôle joué dans le phénomène de satiété. Oui, cette hormone, produite par les cellules stockant la graisse, a pour rôle de signaler au cerveau que bombance est faîte…qu’il est temps de poser la fourchette !

Une équipe de physiologistes, nutritionnistes et neuro-scientifiques canadiens s’est demandée en 2015, si cette hormone intervenant dans le mécanisme de satiété pouvait aussi avoir une influence, via le circuit de la récompense, sur la motivation à courir !

Les neurones à dopamine possèdent en effet des récepteurs à la leptine. Cette leptine semble donc agir sur le circuit de la récompense.

 

 

Pour comprendre son action, les scientifiques ont manipulé génétiquement des souris afin qu’elles ne possèdent plus de récepteurs à la leptine sur les neurones à dopamine.

Et lorsque la leptine ne peut agir sur les neurones à dopamine, les souris affichent une motivation bien plus grande que les autres à faire tourner leur roue. 

Leur conclusion fut donc la suivante : La leptine produite par l’organisme après un repas ou lorsque les réserves de graisse sont abondantes diminue la motivation à courir.

Ce constat peut vous apparaître paradoxal ! Ne serait-il pas préférable qu’en cas de masse graisseuse abondante, l’individu soit incité à courir ?

 Aujourd’hui, oui ! Car la bouffe est dans le frigo !

 Mais par le passé, à l’époque de nos ancêtre cueilleur-chasseur, il était bon quand les réserves de graisse venaient à diminuer, d’être incité au mouvement..Cette motivation à se déplacer afin de rétablir un taux de dopamine induisant un état de bien être allait de pair avait les chances de trouver de la nourriture..

 

Des études antérieures sont mêmes venues démontrer que les athlètes obtenant les meilleurs temps sur marathon ou effectuant du sport de manière addictive étaient ceux qui présentaient les plus bas taux de leptine. Des taux plus bas que ceux qui devraient correspondre à la quantité de matière grasse de leur corps. Et c’est cette faible valeur qui pourrait expliquer en partie leur envie irrépressible de faire du sport.

 

leptine.pngUne faible libération de leptine chez certains individus expliquerait leur désir d'activité physique....

 

 

 

Il semble donc à présent acquis qu’il existe des prédispositions génétiques à toutes formes de dépendance, que ce soit le sexe, la drogue, le jeu ou des activités plus positives comme les maths, la musique ou le sport..

Cette plus forte dépendance occasionnée par un système de récompense hyper-réactif peut s’avérer être une fragilité, un danger…Mais cela peut aussi constituer un véritable atout. 

Oui, si ces individus se mettent au violon, aux maths ou au sport, leur satisfaction sera plus importante en cas de bons résultats…

Dans son livre intitulé « Surdoué, mythes et réalités », la psychologue Ellen Winner écrit la chose suivante :

«  La combinaison heureuse d’un intérêt obsessionnel dans un domaine avec la faculté d’apprendre facilement dans ce domaine mène à de hauts accomplissements ». 

Quant aux moins chanceux, ils vous est toujours possible de méditer cette phrase de Wayne Gretzky,un des plus grands Hockeyeurs de tous les temps : "Ce n'est peut-être pas le talent que m'a donné Dieu, mais la passion.."

 

 

 

 

Bibliographie et sitographie  :

Les gènes du sport/ David Epstein

http://www.blog-lecerveau.org/blog/2015/10/19/ces-molecules-qui-nous-font-courir/

http://www.science-et-vie.com/2015/09/le-plaisir-qui-suit-une-bonne-course-depend-de-la-satiete/

 

 

Autour du même thème : 

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11/07/2016
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